Toulouse à l'annonce du plan aéro : entre espoir des Airbusiens et déception des sous-traitants
Publié : 9 juin 2020 à 21h33 par La Rédaction
Le gouvernement français a dévoilé mardi un vaste plan de soutien à la filière aéronautique, ravagée par la crise du coronavirus, représentant "un effort total de 15 milliards d'euros de la nation", dont 1,5 milliard consacré à la recherche vers un avion neutre en carbone en 2035.
"Nous décrétons l'état d'urgence pour sauver notre industrie aéronautique pour lui permettre d'être plus compétitive" et "plus décarbonée" en produisant l'"avion vert" de demain, a affirmé Bruno Le Maire lors d'une conférence de presse à Bercy.
A elle seule, la compagnie Air France a bénéficié de sept milliards d'euros d'aide de l'Etat sous forme de prêts directs ou de prêts bancaires garantis par la puissance publique, une somme comprise dans les 15 milliards du plan. Cela doit notamment lui permettre de concrétiser la commande de 60 Airbus A220 et 38 gros-porteurs A350 qu'elle avait prévue.
Le ministère des Armées va anticiper dès cet année des commandes d'aéronefs militaires qui étaient prévues pour plus tard, à hauteur de 600 millions d'euros, soit environ 5% de son budget d'équipements, a annoncé la ministre Florence Parly.
L'avion vert
Quelque 1,5 milliard d'euros de financement public seront consacrés dans les trois prochaines années à la recherche-développement dans le but de "parvenir à un avion neutre en carbone en 2035", a annoncé le ministre.
Rencontrés à la sortie de leur usine toulousaine, Jules et Aymeric, salariés de l'aéronautique restent sceptiques "les avions sans carbone sont une alternative pour la suite, mais je ne sais pas si cela sera viable à long terme" modère le premier , "les entreprises sous-traitantes se diversifient effectivement avec ce type d'énergie, mais de là à offrir une perspective pour l'ensemble de la filière... "
Alors que près d'un tiers de 35.000 emplois consacrés à la R&D dans la filière aéronautique sont remis en question par les difficultés du secteur, l'objectif est de préparer les prochaines générations d'avions commerciaux, d'hélicoptères et avions d'affaires dotées de nouveaux modes de propulsion émettant moins de CO2, comme les moteurs à hydrogène et à "très haut taux de dilution".
La sous-traitance
Le Toulousain Philippe Faucard, délégué syndical Unsa Aviation chez Derichebourg regrette que les sous- traitants n’aient pas été évoqués ce mardi "les manques de ce plan : le maintien de l'emploi mais surtout des salaires, on s'aperçoit qu'on va vers la baisse des rémunérations" estime celui pour qui "il n'y a rien de positif, hormis pour l'écologie avec l'avion propre. C'est une grosse déception pour nous".
Le coordinateur du syndicat CFTC d'Airbus, Frédéric Romain, se félicite des annonces "l'avion neutre carbone répond aux attentes de la filière : car il permettra de maintenir les compétences et du niveau d'emploi dans le domaine de la recherche et développement". Il est plus dubitatif sur les commandes militaires "elles ne permettront pas d'amortir le choc". Le syndicaliste regrette "l'absence de volet sur la diversification et la réintrégation de charges de travail depuis des zones à bas coûts".
Le secteur aéronautique représente 300.000 emploi directs et indirects en France. "Si nous n'étions pas intervenus tout de suite, c'est un tiers des emplois de la filière qui auraient disparu", a affirmé Bruno Le Maire, appelant les industriels à tout "faire pour éviter les départs contraints".
Les réactions politiques locales
Pour Jean-Luc Moudenc, Maire de Toulouse, Président de Toulouse Métropole, "avec 90 000 emplois concernés dans notre région, dont les deux-tiers sur le territoire métropolitain, ce secteur est essentiel pour Toulouse. Je me réjouis de cette annonce. Ce plan témoigne de la volonté du Gouvernement de soutenir ce secteur industriel majeur pour Toulouse, pour la France et pour l’Europe. En confirmant la possibilité de l’implantation de la ligne de production de l’A321 XLR à Toulouse, Bruno Le Maire rassure les élus locaux mais également l’ensemble des acteurs économiques toulousains. "
Le président du Conseil départemental de la Haute-Garonne, Georges Méric déclare : "Le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, a annoncé ce matin un plan de relance de l'industrie aéronautique de 15 milliards d’euros. C’est un effort conséquent en faveur d’un secteur économique majeur et prépondérant pour la Région Occitanie et le département de la Haute-Garonne [...] Nous serons attentifs à ce que le plan annoncé par le Ministre de l’Economie soit pleinement effectif dans les meilleurs délais afin de sauver les emplois et d’éviter une hausse massive du chômage."
BV avec AFP.