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Surnommé "le gay", Ouisam a-t-il tué un caïd du Mirail pour laver son honneur ?

Règlement de comptes sur fond de stupre à Toulouse ? La question de l'acquittement se pose devant la cour d'assises. On vous explique pourquoi. 

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25 novembre 2022 à 11h35 par Brice Vidal

 

Ouisam B., petit voyou de la Reynerie est-il devenu un meurtrier parce qu’on le traitait d’homosexuel dans son quartier ? Il comparait pour meurtre et le verdict sera rendu ce vendredi soir. Pour l’accusation, il s’agit d’un règlement de compte à la Reynerie qui, pour une fois, n’a rien à voir avec les stups’. La victime, Abdelkrim Koulel dit « l’immortel », avait été poignardé à mort en juillet 2018. Koulel, trafiquant notoire, avait diffusé des photos compromettantes de l’accusé. Des selfies de 2013 pris en détention où Ouisam B. apparaît les fesses à l’air dans des positions très suggestives.

 

"Porn revenge" dans le milieu des voyous

A partir de là, le jeune homme âgé aujourd’hui de 31 ans sera affublé de sobriquets humiliants. « Personne ne l’appelait plus par son prénom au quartier » nous dit-on, « ça lui a pourri la vie » confirmait à la cour l’enquêtrice de la police judicaire qui a traité le dossier. Il n’était plus Ouisam à la Reynerie mais « le mangeur de quéquettes ». Pour l’avocat de la famille de la victime Me Julien Deviers, l’accusé voulait aussi « reprendre le pouvoir dans une partie du quartier de la Reynerie » et « il va régler un vieux contentieux avec son rival qui a mis sur la place publique des photographies de nature homosexuelle et qui avait – estimait-il - ruiné sa réputation. »

 

L'accusé conteste un crime dans lequel il n'y a aucune preuve directe 

L’accusé, pugnace et regard fier, nie avoir tué, « il intervient quand ça lui semble nécessaire, s’il était taiseux et résigné on dirait de lui qu’il a probablement quelque chose à se reprocher » commente Me Morgane Dupoux l’un de ses avocats. Ouisam va jusqu’à contester l’instruction de la juge Elodie Billot « menée uniquement à charge » selon lui. Il s’exprime bien, moins « blédard » que la plupart des petits caïds habitués des box et des geôles toulousains. Et son histoire de mœurs lui donne un semblant d’humanité, lui à qui la rumeur a dénié le droit d’être un homme. Le milieu des voyous est impitoyable et ces photos l’ont ostracisé, à l’époque il promettait de se venger de Koulel.

Pour ses avocats Mes Morgane Dupoux, Edouard Martial et Hugues Vigier, si le mobile existe, rien ne le relie au crime hormis le bornage téléphonique dans un large périmètre autour du cheminement Messager (lieu du crime), et la rumeur, encore. Par ailleurs, Koulel avait beaucoup d’ennemis, il avait échappé à plusieurs tentatives d’assassinat, lui qui était probablement visé lors de la fusillade qui a coûté la vie à Redouane Bouzegou en 2017. Bouzegou dont le père est venu à la barre "blanchir" Ouisam : "les assassins d'Abdelkrim Koulel sont les mêmes qui ont tué mon fils".

Pour la première fois à Toulouse dans une affaire de règlement de comptes, la question de l’acquittement se pose de manière insistante ; « il n’y a pas d’éléments matériels objectifs le désignant » martèle Me Morgane Dupoux. L'avocat général a requis 20 ans de réclusion criminelle ce vendredi.