Le Russe Tugan Sokhiev démissionne de l'orchestre national du Capitole et du Bolchoï
Poussé à prendre la parole et visiblement tiraillé, le chef d'orchestre n'a pas choisi. Il claque la porte des deux institutions.
Publié : 6 mars 2022 à 19h13 par Brice Vidal
Le chef d'orchestre Tugan Sokhiev démissionne de l'orchestre national du Capitole, et il démissionne aussi du Bolchoï.
"Étant contraint de faire face à l'option impossible de choisir entre mes musiciens russes et français bien-aimés, j'ai décidé de démissionner de mes postes de directeur musical du Théâtre Bolchoï de Moscou et de l'Orchestre national du Capitole de Toulouse avec effet immédiat" explique-t-il sur les réseaux sociaux.
La mairie de Toulouse avait cherché à entrer en contact avec Tugan Sokhiev. Lequel avait fait savoir son intention, d’être présent pour les concerts des 18 et 25 mars prochains à la Halle aux grains. Jean-Luc Moudenc lui avait fait parvenir un courrier pour lui demander de s’exprimer auprès des Toulousains sur la situation actuelle. "Il sait que nous sommes régulièrement questionnés, notamment en tant que ville jumelle de Kyiv, par la presse, les spectateurs, les musiciens sur sa vision de l’actualité" expliquait la mairie. La collectivité avait notamment décidé que l’Orchestre National du Capitole ne serait plus partie prenante des Musicales Franco-russes.
Tensions avec la mairie de Toulouse
"Il m'a fallu du temps pour comprendre ce qui se passe et comment exprimer ces sentiments [...] je n'ai jamais soutenu et je serai toujours contre tout conflit sous quelque forme que ce soit [...] que certaines personnes remettent en question mon désir de paix [...] est pour moi choquant et offensant [...] aussi bien à Toulouse qu'au Théâtre du Bolchoï j'invitais régulièrement des chanteurs et chefs d'orchestre ukrainiens. Nous n'avons même jamais pensé à nos nationalités [...] j'ai lancé le festival Franco-Russe à Toulouse, pour montrer à tous que les Français et les Russes sont liés historiquement, culturellement, spirituellement et musicalement et que je suis fier de ce lien entre nos deux grands pays que j'aime" précise le chef d'orchestre visiblement irrité des pressions politiques qu'il estime avoir subi de la part de la mairie de Toulouse. Le maestro dénonce le fait que les artistes russes soient « menacés, traités de manière irrespectueuse » et victimes de la « cancel culture ».
Jean-Luc Moudenc remercie mais recadre le chef d'orchestre
« Je respecte la volonté de Tugan Sokhiev de mettre fin avec 3 mois d’avance à notre collaboration [...] cette nouvelle m’attriste [...] elle clôture plus de 15 années fructueuses [...] j’ai toujours pensé, comme Tugan Sokhiev, que l’art, et la musique en particulier, sont des langages universels, permettant de rapprocher les peuples. Aussi, nous n’avons jamais attendu ou, pire, exigé de Tugan qu'il fasse un choix entre son pays natal et sa ville de cœur » précise le maire de Toulouse, qui ajoute « pour autant, il était impensable d’envisager qu’il reste silencieux face à la situation de guerre [...] ce soir, je prends acte que le seul parti qu’il prend [...] est celui de la musique.
Par ailleurs, ce qu’il affirme au sujet des Musicales Franco-Russes est totalement hors de propos et inexact. Il sait parfaitement que les choix faits à ce sujet il y a plusieurs mois étaient exclusivement d’ordre juridique, pour éviter les conflits d’intérêts, et que nous avions récemment décidé, d'un commun accord avec lui, de retirer sa mention des documents relatifs à la saison musicale, à cause du contexte actuel. Cela ne procède donc pas d’une intention politique ou de nier l’importance de la culture russe [...] » déclare Jean-Luc Moudenc.