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La justice renforce son arsenal contre la délinquance financière autour de Toulouse

L’Occitanie ferait partie des régions les plus touchées par les délits mettant en cause des élus et des organismes publics. Le procureur général tape du poing sur la table.

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10 octobre 2021 à 15h47 par Brice Vidal

 

Les parquets du ressort de la Cour d'appel de Toulouse vont renforcer leur arsenal contre la délinquance financière. Le procureur général, Franck Rastoul, s’est exprimé vendredi. La parole de celui qui détermine la bonne application de la politique pénale en Haute-Garonne, Tarn, Ariège et Tarn-et-Garonne est rare.

 

Des délais trop longs en matière "éco-fi"

Les délais de jugement pour les affaires de corruption ou de prise illégale d’intérêts "sont déraisonnables" estime Franck Rastoul. Et trop peu d’affaires finissent par être audiencées, il pointe "les recours dilatoires destinés à provoquer une embolie du système". Pour éviter ce phénomène, le chef des procureurs locaux veut favoriser un "prêt-à-juger" "dans le respect du contradictoire" car "pendant trop longtemps nous avons considéré qu'une procédure de délinquance financière pouvait bénéficier d'un renvoi quasi automatique". "Il n'y a pas de raison que la matière économique et financière soit jugée 10 ans après la commission des faits" explique Franck Rastoul. 

Alors le procureur général près la Cour d'Appel de Toulouse va créer un poste de magistrat spécialement dédié à ce type de dossier. Et deux audiences d’appel vont voir le jour chaque mois "pour traiter le contentieux économique et financier". "Nous allons aussi privilégier le circuit-court" indique le haut-magistrat évoquant la procédure de plaider-coupable comme une solution possible.

 

La lutte contre les atteintes à la probité publique : un enjeu majeur

Nos élus et décideurs publics seraient-ils plus corrompus ? Favoritisme, concussion, abus de bien social, prise illégale d’intérêts : l’Occitanie ferait partie des régions les plus touchées par des délits mettant en cause des élus et des organismes publics. Nous serions au même niveau que la région PACA. Le gendarme financier, premier échelon d'alerte, est la Chambre régionale des comptes. Elle est chargée du contrôle des comptes et de la gestion des organismes publics. 

Marie-Odile Allard, procureur financier près la Chambre régionale des comptes se contente d'évoquer "une activité dynamique". Sur 400 dossiers  traités, la Chambre régionale des comptes Occitanie compétente pour les 13 départements de la région, a fait 35 signalements à la justice en 5 ans. Soit 8% de ses contrôles. 11% des dossiers économiques et financiers traités à Toulouse s'apparentent à des atteintes à la probité publique. Ailleurs sur le ressort de la Cour d'appel de Toulouse, ce taux est réduit à peau de chagrin. 

Reste à savoir combien de signalements font l'objet d'une enquête pénale. L'engorgement des tribunaux n'est pas la seule explication à la lenteur judiciaire, les enquêteurs compétents en matière financière doivent être formés "y compris au niveau des brigades locales", Franck Rastoul forme le voeu d'une "nécessaire monter en gamme" des services d'enquête. Récemment la gendarmerie a bénéficié d'un tel programme.

Reste que les mesures exposées vendredi, au sortir d'une réunion interjuridictionnelle entre les parquets locaux, la Cour des comptes et la Chambre régionale des comptes, sont un signal fort à destination des élus fraudeurs car "l'immense majorité des élus et décideurs publics locaux sont exemplaires", fort de ce constat il faut "sanctionner dans un délai utile ceux qui ne respectent pas la loi" et "jettent l'opprobre sur ceux qui respectent la loi au quotidien" souligne Franck Rastoul qui veut s'attaquer à une délinquance financière "qui sape l'autorité de l'Etat et la vision qu'en ont nos concitoyens".