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La gauche toulousaine est-elle vraiment unie derrière Archipel Citoyen ?

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Publié : 21 juin 2020 à 17h54 par Brice Vidal

Analyse des arrangements toulousains à gauche, à une semaine des municipales.

 

La tête de liste Antoine Maurice et Archipel Citoyen - agglomérat d’Insoumis, d’EELV, Générations, aile gauche du PS et Gilets jaunes - font désormais alliance avec le PS, le PC et le PRG. 

Surfant sur une tendance nationale qui pourrait les mener aux commandes de plusieurs métropoles de France, les écologistes et leurs alliés de la France insoumise sont désormais favoris des sondages à Toulouse et pourraient prendre les rênes du Capitole dimanche prochain. Mais parmi les progressistes du bassin toulousain, des voix commencent à s’élever pour dénoncer une union contre-nature entre une gauche d’exercice, pragmatique, et une gauche utopiste voire insurrectionnelle pour les plus radicaux.  

 

Tous derrière Antoine Maurice ? 

Georges Méric veut le faire croire. Le président du conseil départemental de Haute-Garonne l’affirme : le Parti socialiste ne fait qu’un derrière lui. Il faut dire que son éminence grise, Sébastien Vincini patron du PS 31 et vice-président du conseil départemental, a tout tenté, tout ficelé pour faire l’union. Et n’hésite pas à menacer de recours en justice un confrère de France 3 Occitanie par voie de communiqué. Ce dernier avait évoqué des démissions collectives au sein d’un Parti socialiste, selon lui plus divisé que jamais sur la question de l’union avec Antoine Maurice. 

Pourtant le PS tirait à boulets rouges sur le romantisme "baba cool" d’Archipel Citoyen depuis le début de cette campagne électorale. Les assemblées générales permanentes, les groupes de travail, les laboratoires d’idées c’était bien joli, mais pour que ça file droit : il fallait un chef, une ligne, bref, un parti ! Curieusement depuis le retrait de Nadia Pellefigue et l’union avec Archipel, le PS fait amende honorable : oui, il s’est trompé. Biberonné au pragmatisme économique et à la démocratie représentative, Claude Raynal pose maintenant au côté des amis de Manuel Bompard (LFI) et vante désormais la pertinence de l’horizontalité et du référendum citoyen permanent. Sacrée volte-face. 

À gauche, ils sont pourtant plusieurs à considérer qu’il s’agit d’une manœuvre destinée à faire passer cet accord d’appareils. Certains proches, compagnons de route et sociaux démocrates - pas encore partis chez LREM - l’ont en travers de la gorge. Sans parler du PRG, Jean-Michel Baylet est-il tombé de sa chaise en apprenant que Pierre-Nicolas Bapt avait souscrit à l’union avec Archipel ? 

 

Carole Delga et son soutien timide 

Ce n’est probablement pas un hasard si Carole Delga apporte un soutien du bout des lèvres à Antoine Maurice et Archipel Citoyen (elle s'affiche pour la première fois ce lundi à ses côtés) : le projet économique de la liste Insoumis / EELV / ex-gauche socialiste est à l’opposé des desseins de la présidente de région et de son réalisme économique, elle qui travaille d’arrache-pied pour tenter de sauver notamment la filière aéronautique, promeut aussi la LGV. Tout le contraire d’Archipel qui vante une variante de la décroissance. Notez qu’à Lille, Martine Aubry, qu’on ne soupçonnera pas de dérive droitière, est aux prises avec une liste semblable à Archipel Citoyen ; et a même reçu le soutien appuyé (et effrayé) de son rival de droite pour le second tour. 

 

Georges Méric et ses amis adeptes du grand écart 

Alors, à quoi joue le département de la Haute-Garonne en jouant sur la dialectique "ancien monde/nouveau monde" ? Georges Méric et Sébastien Vincini, conscients des enjeux de crise majeurs qui attendent Toulouse, jouent-ils les apprentis sorciers en rejoignant des écologistes radicaux et la France insoumise ? En fait, Georges Meric, outre le fait de peut-être vouloir sauver le soldat Claude Raynal et son poste au Sénat, veut faire tomber Jean-Luc Moudenc à tout prix. Il redoute, l’exemple lyonnais de « métropolisation » : voir à terme Toulouse Métropole avaler, récupérer un large pan des compétences du département, ce qui ferait du Conseil départemental 31 (1,7 milliard de budget à date) une coquille vide. Voilà qui pourrait expliquer que le strausskahnien Claude Raynal soit désormais Archipel mitoyen... 

 

L’économie toulousaine Archipel compatible ? 

Ne serait-ce pas un jeu électoral dangereux pour Georges Méric de défendre ainsi « son bifteck » ? Car le PS de Haute-Garonne, affaibli, n’est pas aujourd’hui en mesure de dicter une conduite à Antoine Maurice. Naguère puissant, il sera durant l’exercice du mandat municipal, entité négligeable. Et si le « laboratoire » Archipel Citoyen, son « écologie sociale et heureuse », ne s’avérait être qu’un joli projet romantique piloté par des amateurs déconnectés des réalités économiques ; le dynamisme de la métropole toulousaine, cité jusque-là en exemple, pourrait le payer très cher. Nombreux à gauche considèrent encore que le premier bouclier social : c’est l’emploi.