Castres : "Valentin n'a pas eu de sursis, nous, nous avons pris perpétuité"
Le Tribunal correctionnel de Castres devait juger le mardi 5 octobre le conducteur du fourgon qui avait percuté le petit Valentin, 6 ans, à Puylaurens en 2017.
Publié : 6 octobre 2021 à 11h24 par Axel Mahrouga
Jusqu'à la lecture d'une lettre écrite par la maman du petit Valentin, les larmes dans les yeux de la familles étaient jusqu'alors contenues. Mais lorsque Marjory s'avance à la barre du Tribunal correctionnel de Castres (Tarn), la voix certaine, mais le corps tremblant, les sanglots envahissent la salle.
Quelques mots, sur son « petit trésor aux yeux bleus », son « petit artiste en herbe, futur basketteur et heureux de devenir grand frère à son tour. S'il avait ralenti avant, rien ne se serait passé ».
Après cette lecture, le prévenu revient devant les juges, les yeux brillants. Pendant l'audience, le trentenaire assure que, ce 16 avril 2017, aux alentours de 12h, il ne roulait pas trop vite. « 48 km/h », précisa-t-il en pointant le rapport des experts. Une argumentation qui ne satisfait pas les magistrats. Eux, pointent une vitesse non adaptée à la situation, même si les limitations de vitesse étaient respectées. « J'allais ralentir ! », lance le prévenu. Le grand-père de Valentin, écoutant religieusement les explications de celui qui a ôté la vie de son petit-fils, répète cette phrase avec dépit.
Nuit de fête et méthadone
Si les rapports des experts ont pu conclure que le conducteur n'était pas en mesure d'éviter le choc, ayant vu le jeune garçon, « 2 secondes avant l'impact », le procès se joue surtout sur les événements qui précèdent le choc. La nuit d'avant, le trentenaire a passé la nuit en soirée, accompagnée de sa fille du même âge que le petit Valentin. Une soirée où le prévenu affirme avoir pris suffisament de repos avant de reprendre le volant. Mais voilà, des SMS échangés tout au long de la nuit viennent contredire sa version des faits. « J'ai un message, je répond et je me rendors », expliquera-t-il. Un argument qui ne convaint pas la procureure, pointant que l'individu n'avait « pas eu au moins deux heures de sommeil consécutif ».
Surtout, le prévenu présentait dans son sang des traces de méthadone. Une substance qu'il prend, sous ordonnance, pour traiter sa dépendance à l'héroïne. « Vous connaissez les effets du mélange alcool et méthadone ? », demande la présidente du tribunal. « Je n'étais pas au courant », répond timidement le prévenu. Puisqu'avant l'impact, le prévenu avait consommé un verre de bière, « un demi-verre », précisera-t-il à l'audience. Au moment de l'accident, il avait été contrôlé avec 0,10 g d'alcool par litre de sang, sous la limite légale.
Ce qui a agacé le tribunal en ce début de soirée, c'est surtout le casier judiciaire du conducteur. Déjà en 2004, il avait été impliqué dans un accident de la route où son passager avait été blessé. En 2018, un an après l'accident, il est contrôlé positif à l'alcool, au volant de son véhicule. « Vous attendez quoi ? Tuer quelqu'un d'autre ?, lance la magistrate. La question que l'on va devoir se poser c'est comment faire pour que vous compreniez et que ça ne se reproduise pas ».
Délibéré le 16 novembre
Retraçant les événements « de cette journée supposée festive », l'avocate des parties civiles pointe « l'attitude exécrable » du prévenu pendant l'enquête. Pour la procureure, « Ce qui est reproché à monsieur aujourd'hui ce n'est pas d'avoir percuté l'enfant mais, le fait, en amont, de ne pas avoir réduit sa vitesse au regard des circonstances ». Deux plaidoiries à charge que l'avocat du conducteur ne peut que comprendre. « L'artisan de ce drame c'est monsieur, ce n'est surtout pas la famille ». Mais son client ne pouvait anticiper le choc. « Il n'y a pas de ballon rouge madame », lance-t-il en référence à une métaphore filée tout le long de l'audience par la magistrate pour expliquer comment le conducteur aurait-dû adapter sa vitesse. « Même si l'on faisait comme les babyloniens, appliquer la loi du Talion en jetant sa fille du même âge aux fauves, ce ne serait pas suffisant ».
Il plaidera ainsi la relaxe de son client. La procureure quant à elle, demande 3 ans de prison dont un avec sursis. Le tribunal doit rendre son jugement le 16 novembre prochain. Encore un mois à attendre pour la famille. Peut-être le dernier.