Bédarieux. Samire Lymani a-t-il étranglé Aurélie Vaquier avant d'enterrer son corps dans un sarcophage de béton ?
Le tueur présumé, ex-compagnon de la victime, est jugé à partir d'aujourd'hui à Montpellier.
9 janvier 2024 à 11h04 par La rédaction avec AFP
Accusé d'avoir étranglé sa compagne puis de l'avoir enterrée au domicile conjugal, dans un sarcophage de béton, Samire Lymani va encore et toujours "clamer son innocence" mardi à l'ouverture de son procès à Montpellier, devant les assises de l'Hérault, malgré les nombreux éléments à charge. Et s'il "appréhende" ce rendez-vous avec la justice c'est parce qu'il "n'est pour rien" dans ce décès, qu'il "est accusé à tort" et que "le vrai coupable court toujours", trois ans ou presque après la découverte du corps d'Aurélie Vaquier, 38 ans, le 7 avril 2021, a insisté son avocat, Me Mathieu Monfort, auprès de l'AFP.
Pour l'accusé, 41 ans, en détention provisoire depuis la découverte macabre, ce sera l'occasion d'enfin "s'expliquer" et de donner un "nouvel éclairage" sur les faits, a expliqué son conseil. Jugé jusqu'au 17 janvier, il encourt la réclusion criminelle a perpétuité. Samire Lymani avait signalé la disparition de sa compagne le 23 février 2021, près d'un mois après que, selon lui, elle avait donné signe de vie pour la dernière fois. Elle aurait quitté le domicile conjugal avec uniquement son téléphone portable et quelques vêtements, puis elle aurait envoyé un message étrange, évoquant son désir de se retirer pour écrire. Son cadavre avait finalement été découvert par les gendarmes au domicile même du couple, sous un cercueil de béton de 2 m sur 1 m coulé sous une estrade en bois couverte d'un empilement d'objets. Selon l'hypothèse "privilégiée" par les médecins légistes, la jeune femme aurait été étranglée. Restera à déterminer si elle n'a pas été enterrée inconsciente, certes, mais vivante, une thèse envisagée par ces mêmes légistes.
Personnalité caméléon
Père de deux enfants, en cours de divorce, l'accusé, ancien militaire et ex-chauffeur routier, s'était installé dans l'Hérault à l'été 2020. Il y avait rencontré Aurélie Vaquier, trentenaire brune au large sourire et au "fort caractère", selon ses proches, vendeuse de produits cosmétiques artisanaux sur les marchés et très active sur les réseaux sociaux, avec qui il avait rapidement emménagé, à Bédarieux, dans le Haut-Languedoc. Le couple avait pour projet de créer un commerce mais les disputes étaient fréquentes et la jeune femme avait confié à une amie être au bout du rouleau. Aux enquêteurs, Samire Lymani a affirmé que sa compagne était partie se ressourcer fin janvier et que lui-même s'était rendu au même moment en région lyonnaise, récupérer son fils et un neveu. De retour au domicile conjugal une semaine plus tard, il n'avait pas signalé sa disparition mais avait continué à utiliser sa carte bancaire, tout en tenant des propos désobligeants à son égard et en fréquentant assidument des sites de rencontres. Si, pour les enquêteurs, ce comportement "inadapté" et "incohérent" ainsi que de "nombreux éléments à charge" le désignent comme le coupable, son avocat critique lui une instruction menée pour "charger au maximum" le seul suspect identifié. "Des fautes d'orthographe, elle en faisait", souligne-t-il notamment, alors que les enquêteurs s'appuient sur les nombreuses coquilles dans le dernier message d'Aurélie Vaquier pour estimer que Samire Lymani en était le véritable auteur. Ils sont également persuadés que le sarcophage de béton où elle a été retrouvée a bien été réalisé par son compagnon, un tel ouvrage ayant nécessité au moins "six heures de travail". Réfutant cette version, Samire Lymani assure que sa compagne a été tuée durant son absence de Bédarieux, par un inconnu, qui l'aurait ensuite enterrée. Et il n'aurait découvert cette dalle que le 7 avril, avec la découverte du corps. Evalué par les psychiatres et psychologues comme un homme "impulsif", à la "personnalité caméléon" et "borderline", l'accusé présentait "une toute puissance infantile" doublée d'"une immaturité psycho-affective". Mais cela n'aurait pas aboli ou altéré son discernement.
En moyenne, un féminicide survient tous les trois jours en France. Le ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti a récemment avancé le chiffre de 94 féminicides en 2023, contre 118 en 2022, une baisse accueillie avec prudence par les associations féministes.