INTERVIEW 100% : L'enseignant du Mirail accusé à tort de harcèlement sexuel veut "laver son honneur"
Publié : 15 janvier 2020 à 15h31 par Brice Vidal
Il a choisi 100% pour s'exprimer pour la première fois depuis la polémique.
Il préfère taire son nom pour dit-il "préserver sa famille", sa femme et sa fille emportées avec lui dans "un tsunami" après les allégations mensongères qui ont brisé sa carrière.
Il fait partie des deux enseignants de la Fac du Mirail virés sans ménagement après une enquête interne bâclée et à charge "mon honneur a été sali et je veux une réhabilitation". Explication.
Histoire d'une lamentable délation
L'agrégé d'Arts Plastiques décrit des accusations vécues comme "un attentat". "C'est extrêmement violent. J'ai été abasourdi et effrayé par ces calomnies. Mes états de service sont bons en 26 ans d'enseignement" se justifie celui qui affirme "ne jamais s'être rendu coupable de ce qu'on me reproche."
"Même après la décision de justice qui me blanchie, il reste un soupçon impossible à éliminer" déplore l'enseignant qui a préféré arrêter les anti-dépresseurs "je dois avoir les idées claires pour me défendre." "Heureusement qu'il y avait ma femme et mes proches pour me soutenir, sinon c'était la chute" explique-t-il.
Mai 2019, le syndicat UET (Union des étudiants de Toulouse) alléguait de faits de harcèlement sexuel et moral de la part de deux professeurs agrégés. Les deux quinquagénaires ont été sanctionnés mi-juillet par une commission disciplinaire interne à l’UT2J. Ils sont interdits définitivement « d’exercer des fonctions d’enseignement ou de recherche dans tout établissement public d’enseignement supérieur ». Une première en France.
Le Procureur de la République s'est autosaisi de l'affaire. Et l'enquête de police menée à charge et à décharge a conclu à l'absence de charge. Les deux professeurs, innocents, ne seront pas poursuivis. Reste la trace d'une souillure "je veux qu'on lave mon honneur à présent" clame ce prof d'une cinquantaine d'années. Son confrère, co-accusé et lui aussi innocenté, a préféré jeter l'éponge face à la calomnie : il fera bientôt valoir ses droits à la retraite.
Des professeurs victimes d'une vengeance et de manipulation
Parmi les auteures des dénonciations figurent des étudiantes qui ont eu plusieurs conflits d'ordre pédagogique avec les professeurs en question. La sacro-sainte "parole libérée" a-t-elle été motif à basse vengeance ?
Certains étudiants biberonnés au "gender studies" ont dénoncé une soi-disant omerta : les deux quinquagénaires "dominants" s'étaient donc, à leurs yeux, forcément rendus coupable de harcèlement moral et sexuel, puisqu'il y avait des victimes ! La justice leur a donné tort. Plutôt qu'une omerta, on a affaire ici à une probable vendetta personnelle. Une manipulation due au conditionnement des discours radicaux qui relèvent de la théorie du genre : culpabiliser les mâles blancs de plus de 50 ans.
Ce fiasco met aussi en lumière une forme de lâcheté de la part de la direction de l'université du Mirail qui a hurlé avec les loups, quand ces professeurs auraient eu besoin d'une enquête interne, à charge et à décharge.
Ainsi, plusieurs éléments sonnant faux dans ce dossier auraient pu être relevés. Les accusatrices dénonçaient un chantage au passage en master de la part des enseignants incriminés. Or, ces enseignants de licence n'interviennent pas en master et ne sont pas dans les commissions d'admission ! "C'est fou que la fac puisse laisser passer ça, c'est tellement facile à vérifier" s'indigne le quinquagénaire. Lequel a reçu le soutien des trois-quarts des enseignants titulaires du département arts plastiques lors de l'enquête administrative.
Mais clouer au pilori ces deux profs n'aurait pas été possible sans une volonté de règlement de comptes, à l'intérieur même de l'UFR.
La fac a-t-elle acheté la paix sociale en sacrifiant les deux professeurs ?
Pourquoi diable la fac a accablé des enseignants innocents ? Une tentative d'explication : la direction de la faculté sortait d'un très long blocage en 2018 et venait de changer de gouvernance. Emmanuelle Garnier, la présidente, a -t-elle capitulé dans le sillage du mouvement #metoo, face à des étudiants très politisés, et dépositaires d'une parole uniquement victimaire ? Probable.
Cela attesterait donc d'une dérive de cette université, où les étudiants ont quasiment pris le pouvoir. Une faculté où le niveau baisse, où certains étudiants travaillent peu et sont paradoxalement très critiques et enclins à beaucoup revendiquer. Résultat : ils affrontent l'enseignant tout en refusant sa critique.
Viré comme un malpropre par l'université et innocenté par la justice comme son confrère, le professeur veut maintenant une réhabilitation ; "le dossier passe en appel devant le Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche (CNESER), ça mettra 10 à 12 mois."
Contactée, l'Université Jean Jaurès nous précise ce mercredi que "ces sections disciplinaires exercent leur pouvoir de manière indépendante de la direction de l’établissement. Elles sont composées de représentant·e·s élu·e·s par le conseil académique de l’université et sont destinées à réguler le fonctionnement des universités et, le cas échéant, à sanctionner des comportements fautifs des membres de leur communauté [...] Dans le cas contraire, les personnes sont mises hors de cause."
Me Emmanuelle de la Morena défend l'enseignant injustement accusé dans le volet administratif. Me Pascal Nakache s'occupe du volet pénal.
L'étudiante Cynthia N., principale accusatrice, fait désormais l'objet d'une plainte pour dénonciation calomnieuse.
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