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3e ligne de métro à Toulouse : déblais, débats et dérapages en conseil municipal

Un conseil municipal extraordinaire votait l’autorisation environnementale.

8 février 2022 à 13h53 par Brice Vidal

 

« Etes-vous une cause perdue pour la lutte contre le changement climatique ? » Des frottements d’entrée de jeu, ce mardi, en Salle des Illustres au Capitole. François Piquemal mécontent du plan climat métropolitain offrait un cadeau (empoisonné) au maire de Toulouse le livre : l’écologie pour les Nuls… « bougez-vous » concluait l’élu d’opposition. Le maire énumérait ses avancées en matière d’écologie à Toulouse et invitait à son tour son opposant à réviser sa leçon. Pierre Esplugas montait au créneau pour dénoncer « le dogmatisme » de l’opposition municipale : « le réquisitoire est implacable mais il y a du mieux sur les émissions de GES, nous consommons moins d’énergie, l’artificialisation des sols est en baisse et nous produisons plus d’énergie renouvelable » expliquait-il.

 

3e ligne de métro à Toulouse : une enquête environnementale controversée ?

 

Un vote important intervenait, ce mardi, dans le cadre d’un conseil municipal extraordinaire à Toulouse : l’avis des élus sur le dossier d’autorisation environnementale. Selon l’opposition les chiffres de l’enquête publique sont « insincères », la construction de la 3e ligne va engendrer 413 000 tonnes d’équivalent carbone, alors que le dossier d’enquête publique tablait sur moitié moins. « 2 milliards et demi d’euros pour moins de 3% de trafic routier évité ? » demandait Aymeric Deheurles. Les chiffres de l’enquête publique ont-ils été bidonnés comme l'expliquait l'opposition ? Non, mais la majorité va devoir « actualiser » certains points de l’évaluation environnementale. 

 

Une opposition combative…

 

Romain Cujives, sans remettre en cause le projet, glosait « sur l’insincérité des chiffres » et lançait « n’êtes-vous pas chers collègues de la majorité les principaux adversaires de cette 3e ligne de métro ? ». « Ce projet ne peut pas se faire à n’importe quel prix » abondait Héléne Cabannes (EELV) qui s’inquiétait d’une gestion des déblais « laissée à la libre appréciation des entreprises privées ». Selon l’écologiste, par ailleurs, « le maître d’ouvrage ne prévoit rien en terme de surveillance des nappes phréatiques ».

L’abattage des arbres (environ 2000) ne sera compensé qu’à un niveau « d’un pour deux ou trois », quand les opposants voudraient « 1 pour 10 ». A ce titre, la mairie « n’est pas à la hauteur des enjeux » et les élus de l’opposition ont émis un avis défavorable à cette autorisation environnementale qui « doit être retravaillée ».

« Les masques tombent, vous êtes contre la 3e ligne » avançait Pierre Esplugas avant que Maxime Boyer ne s'atèle à répondre aux questions de l’opposition. « 5000 arbres devaient être replantés » et « tous ne sont pas jeunes ». « On ne jettera pas les 2,8 millions de m3 de déblaies » qui seront « valorisés à 80% » et « un plan de prévention des pollutions accidentelles sera déployé ». 

 

… puis « cornérisée » sous le feu nourri des questions de la majorité !

 

Inédit. Visiblement décidée à en découdre sur le plan politique et dans une stratégie concertée,  la majorité interpellait directement les élus d’opposition - Antoine Maurice, Agathe Roby, Vincent Gibert, Isabelle Hardy ou Hélène Cabanes – notamment sur les solutions proposées par la gauche écologiste toulousaine pour financer, construire et rendre plus vertueuse sur le plan écologique la 3e ligne de métro. 

 

1h30 sous l’œil amusé et complice du maire Jean-Luc Moudenc. L’opposition, surprise et peu habituée à échanger les rôles, semblait cornérisée. Un interrogatoire « policier » dénonçait Hélène Magdo qui s’apparente à « du théâtre » : « ce n’est pas le rôle de l’opposition de répondre à ces questions, ni pallier vos manques. »  « Jamais depuis 2008 un conseil municipal ne s’est déroulé ainsi » s’élevait Romain Cujives. « Autoritarisme décomplexé et volonté d'humilier l'opposition » contre-attaquait Maxime Le Texier. Une inversion des rôles pas vraiment du goût de l'opposante historique Michèle Bleuze, alors que l'opposition semblait incapable de répondre sur ces sujets techniques « c'est l'effet que Jean-Luc Moudenc et son cabinet ont voulu donner. Du jamais vu. »

 

« Vous voulez des débats démocratiques, mais les questions vous dérangent » raillait en retour Jean-Luc Moudenc. Le maire entendait dénoncer par cette séquence aussi inédite que malaisante « le positionnement ambigu de l'opposition » sur ce dossier et regrettait « la politisation de certaines associations, sans cesse citées par l'opposition et produisant des chiffres et contestant les nôtres ». Jean-Luc Moudenc n'offrait aucun livre ce mardi, mais la séquence aura probablement valeur de "leçon". L'autorisation environnementale était voté vers 14h30.