Agressions sexuelles dans un club de foot près de Toulouse : le président interdit d’exercer à vie suite au défaut de signalement
Dominique Bru, ancien président de l’Etoile Aussonnaise, écope d’une lourde sanction administrative. Comme deux autres dirigeants. Il est accusé de n'avoir pas pris au sérieux les alertes liées au prédateur sexuel Didier Thomas.
Illustration - école de foot
Crédit : @AdobeID
10 octobre 2023 à 16h42 par Brice Vidal
La direction "savait" et n'a rien fait affirmaient déjà les « mères courage » en 2021. A l’époque Didier Thomas, homme à tout faire et entraîneur du club de football d’Aussonne venait d’être condamné à 8 ans de prison pour une vingtaine d’agressions sexuelles sur des enfants et adolescents licenciés de l’ex-Etoile Aussonnaise, dans la banlieue ouest de Toulouse. Des faits sordides. L’éducateur s’enfermait notamment dans les vestiaires avec ses victimes, au prétexte de leur couper les cheveux, il leur rasait le sexe et se rendait coupable d’attouchements.
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Soutenus par l'association Colosse aux pieds d'argile, plusieurs familles de victimes ont voulu aller plus loin, estimant que la direction du club n’avait pas pris au sérieux les signalements, c’est en tout cas ce qui ressort de l’enquête pénale. Des mères comme Maryline et Isabelle ont saisi le ministère des Sports.
La sanction vient de tomber et elle est très lourde : une formation disciplinaire a décidé le 28 juillet de radier à vie l’ancien président du club d’Aussonne, Dominique Bru, pour « défaut de signalement et passivité dans la gestion des alertes » nous indique une source proche du dossier. Deux autres dirigeants sont interdits d’exercer des fonctions dans un club sportif pendant 5 ans. Une décision sinon unique, à tout le moins très rare. "Aujourd’hui, ces gens-là, présidents, salariés, entraîneurs ou bénévoles, doivent savoir que quand il y a alerte, ça doit pris au sérieux et consigné par écrit [...] à l’avenir les dirigeants seront sensibilisés sur les sanctions" ; "si les personnes en poste à l’époque avaient fait le nécessaire : il n’y aurait pas eu toutes ces victimes » analyse Maryline ; "nous espérons que cela aura une valeur pédagogique" ajoutait Isabelle.
Dominique Bru a fait appel : "mon honneur en jeu"
Le dirigeant mis en cause ne l’entend pas de cette oreille : "C’est mon honneur qui est en jeu" contre-attaque Dominique Bru, qui a fait appel par le biais de deux recours déposés au tribunal administratif. L’ancien dirigeant, représenté par Me Martin Vatinel, conteste la sanction : "je suis au côté des victimes mais je ne me sens pas responsable du tout !" assène-t-il "si j’avais reçu des signalements concernant les agissements de Mr Thomas, j’aurais réagi, mon fils et celui d’un des éducateurs sanctionnés participaient aux entraînements de Mr Thomas, imaginez-vous !" Ajoutant "si je suis sanctionné suite à cette affaire c’est la mort du bénévolat... "
Selon des documents que nous avons pu consulter, un soigneur du club a affirmé que lors d'une réunion du club, il avait été évoqué "la trop grande proximité de Didier Thomas avec les élèves" et "le fait qu'il s'enfermait avec eux pour les coiffer et/ou leur raser le sexe". Une infirmière bénévole du club ayant entendu "des rumeurs sur des gestes déplacés envers certains jeunes" trouvait Didier Thomas "trop tactile avec les joueurs" " il voulait toujours s'isoler avec eux lorsqu'ils étaient blessés". Le juge d'instruction en a naguère conclu que "les dirigeants du club n'ont pris aucune disposition afin de prévenir la réalisation des faits en cause..." Le club d'Aussonne est depuis quelques mois une entente, FC MAS (Mondonville-Aussonne-Seilh), Dominique Bru en a été l'éphémère président.