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Procès de l'accident de Millas : "si elle a deux yeux, elle a dû voir les barrières se fermer", témoigne une jeune victime

C'est lors du deuxième jour d'audience ce mardi que cinq adolescents ont livré leur récit du terrible drame. Tous étaient dans le bus il y a près de cinq ans, quand il a percuté un train sur un passage à niveau de Millas. 

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20 septembre 2022 à 15h40 par John Bourgeois


Ils étaient cinq courageux adolescents à s'exprimer à la barre ce mardi 20 septembre à Marseille, pour le procès de l'accident de Millas. Après le récit de la conductrice du bus la veille, ce sont les bouleversants témoignages d'enfants victimes qui se sont succédés pour ce deuxième jour d'audience, près de cinq ans après la collision entre leur car et un train sur un passage à niveau de la commune, où 6 de leurs camarades étaient morts ce jour-là.

Des souvenirs d'abord assez flous

Ce sont désormais de jeunes hommes et femmes que l'on a pu entendre ce mardi lors du procès du drame de Millas. Âgés pour la plupart d'environ 17 ans, ils en avaient entre 12 et 13 au moment de l'accident. Tous ont été blessés lors de ce terrible choc sur le passage à niveau n°25 de Millas, et les séquelles sont tant physiques que psychologiques. Enzo a été le premier à s'exprimer à Marseille. Lui se remmémore "avoir fait un tour de magie" à un camarade juste avant le drame, avant "d'entendre le klaxon du train." Un klaxon qui lui restera en tête un long moment, et qui lui vaudra un suivi psycologique.

Tout en déroulant leur récit, c'est une principale question qui trouva plus ou moins de réponses pendant les auditions de ces victimes : avaient-ils vu une barrière levée sur le passage à niveau de Millas ? Nadine Oliverira, la prévenue, maintient que oui. Pour Enzo, après le tour de magie et le klaxon, "c'est le noir complet". Un flou qui va se ressentir dans le témoignage d'autres adolescents, comme Elona. C'est en lisant le récit de ses auditions qu'on apprend qu'elle se souvenait d'abord de "barrières levées", avant d'être perturbée par le premier jour du procès. Impossible pour elle finalement de certifier quoi que ce soit. 

« Les barrières étaient fermées, bien fermées, j’étais devant »

C'est très ému qu'Inès s'est aussi présentée à la barre ce mardi. Elle n'a également que très peu de souvenirs de l'accident, si ce n'est "l'odeur de brûlé" quand elle se réveille à terre. Elle dit 'ne pas avoir vu les barrières se baisser", mais avoir été sûrement "influencée" par le récit d'autres camarades. C'est un peu le même son de cloche pour Océane, qui n'a elle pas pu contenir ses larmes quand il s'agissait de décrire l'ambiance dans le bus avant le choc. A ce moment-là, c'est le "trou noir" pour l'adolescente, qui ne se rappelle que de son réveil et des cris qui l'entourent. 

C'est le témoignage d'Alicia, qui s'est finalement différencié ce mardi. Elle était assise au devant du bus lors du drame, à côté de la conductrice. Amputée d'une jambe depuis près de 5 ans, c’est sereine que la jeune femme s'est présentée au procès. Ses souvenirs apparaissent plus précis, notamment quant à la principale interrogation de l'audience. "Les barrières étaient fermées, bien fermées, j’étais devant", a-t-elle déclaré. Le discours d'Alicia s'oppose de manière claire à celui de Nadine Oliveira, la conductrice du car. "Si elle a deux yeux, elle a du voir les barrières se fermer", ajoute même Alica qui "en veut et en voudra toute sa vie à Nadine Oliveira".

La prévenue écoute, sans un regard ni une parole 

La conductrice, elle, est restée tête baissée tout au long des auditions des enfants. Quelques larmes ont coulé sur son visage, mais aucun regard ne s'est tourné vers les victimes, et aucun mot n'ont été prononcés de sa part. Du côté des adolescents, seule Alicia a esquissé un regard vers Nadine Oliveira. La désormais lycéenne a fini son témoignage par une phrase qui n'aura laissé personne indifférent : “J'avais 13 ans et en deux minutes, je suis devenu une adulte. J’ai tout perdu, mon enfance, mes amis.”